Au cours des six derniers mois, nous avons eu droit à un merveilleux kaléidoscope d’impressions sur l’avenir de l’alimentation. En effet, une douzaine de leaders, penseurs et auteurs ont présenté leurs réflexions sur notre blogue à raison d’un billet aux deux semaines. J’ai l’honneur de connaître la plupart d’entre eux depuis un certain temps et pourtant, leurs billets m’ont permis de découvrir des pensées originales et d’apprendre de nouvelles leçons. Pour conclure la série, j’ai décidé de passer en revue les billets dans leur ensemble et de présenter quelques faits saillants, reprenant sans honte les propos des auteurs dans le but d’attirer (de nouveau?) les lecteurs vers leurs récits et leurs perles de sagesse.
Selon nos blogueurs, l’avenir de l’alimentation est à la fois clair et sombre.
Sombre, parce que bon nombre de nos pratiques, cultures et systèmes actuels prouvent néfastes à la santé, à l’environnement et aux communautés. Les communautés autochtones dont la relation traditionnelle à l’agriculture, à la terre et au patrimoine alimentaire a été perturbée, et qui souffrent souvent d’insécurité alimentaire sont un exemple. Le monde des poissons et des fruits de mer qui demeure embourbé dans l’anonymat, des publicités toxiques du géant de la restauration rapide KFC annonçant du vernis à ongles « bon à s’en lécher les doigts » et des modèles climatiques et météorologiques dorénavant inévitables, auxquels il sera difficile ou impossible de s’adapter, constituent d’autres exemples.
Mais clair aussi en raison de l’espoir suscité par la nouvelle tendance dans les marges qui vise une production très locale et à petite échelle; le potentiel de la terre d’offrir un bon rendement sans sacrifier la biodiversité, les éléments nutritifs et une rémunération juste pour les agriculteurs; la volonté de certains entrepreneurs ou investisseurs du domaine de l’alimentation de laisser une empreinte moindre sur la planète; la capacité des pêcheurs et des consommateurs d’entrer de nouveau en relation grâce à la technologie; et la possibilité d’élaborer conjointement une politique alimentaire nationale. Quelle belle époque que la nôtre, puisque les possibilités sont multiples et les enjeux stimulants. La passion qui transparaît lorsque les blogueurs parlent de leur plat réconfortant et des gens, organismes ou mouvements vers qui nous devrions nous tourner pour de l’inspiration et des idées quant à l’avenir de l’alimentation prouve aussi qu’il y a de la lumière à l’horizon.
On peut voir le système alimentaire comme un pendule qui se balance d’un côté à l’autre. D’un côté, il y a le lait diafiltré mentionné par Isabelle Mailhot-Leduc, qui s’avère plus performant et coûte moins cher pour les consommateurs. De l’autre, il y a le lait qui provient de la race menacée la Canadienne, qui rend le bassin génétique plus diversifié et le système alimentaire plus résistant. Andrew Heintzman prévoit un retour du pendule vers une plus grande résistance (ou durabilité), la preuve étant que les 25 plus grandes entreprises américaines du secteur alimentaire ont perdu 18 milliards de dollars en part de marché alors que les ventes d’aliments biologiques ont triplé.
Le côté performant du pendule signifie peut-être de plus bas prix à court terme, mais cela à un coût très élevé pour l’environnement, la santé humaine et les économies locales. Comme l’a souligné Ruth Richardson, nous devons inclure le coût réel de production dans le bénéfice net pour que la production durable, diversifiée et résistante connaisse du succès. Nous avons besoin d’un mouvement parallèle pour garantir une distribution adéquate des ressources, et ce, afin que nous puissions tous payer le coût réel de notre nourriture, évitant ainsi le besoin pour certains de recourir à des banques alimentaires ou d’acheter des aliments de mauvaise qualité.
Hal Hamilton a écrit que ceux qu’on appelle les bonnes âmes tentent de comprendre qui sont les héros et les vilains dans cette histoire, mais que les rôles ne sont plus définis de manière si évidente. Je sais que lorsque je prends ma voiture pour me rendre jusqu’à la ferme de l’agriculteur que je soutiens dans le cadre d’un programme d’ASC pour lui « donner » quelques heures de travail, l’essence nécessaire pour m’y rendre élimine les avantages de ma main-d’œuvre, mais je me sens néanmoins héroïque. Alors que nous préparons l’avenir de l’alimentation dans les soins de santé par l’entremise du programme Nourrir la santé, j’essaie de garder en tête qu’il n’y a pas de vilain, mais plutôt une foule de problèmes systémiques qui empêchent de fournir facilement des aliments sains, frais et durables dans les hôpitaux.
Mais un monde meilleur est à notre portée. N’oublions surtout pas, au moment où nous avançons vers l’avenir, que l’histoire a prouvé qu’ensemble, nous pouvons accomplir des merveilles.
Les blogues de la série sur l’avenir de l’alimentation:
- L’alimentation au futur, par Beth Hunter, directrice des programmes
- Retour vers le futur : rééquilibrer nos systèmes alimentaires, par Andrew Heintzman, PDG et cofondateur d’InvestEco.
- L’avenir de l’alimentation : préserver la diversité pour assurer la résilience, par Jane Rabinowicz, directrice de l’Initiative de la famille Bauta sur la sécurité des semences au Canada et Bob Wildfong, directeur général de Semences du patrimoine Canada
- L’avenir de l’alimentation : du personnel au mondial, par Ruth Richardson, directrice générale de l’Alliance mondiale pour l’avenir de l’alimentation
- La technologie – un retour vers l’avenir du poisson, par Eric Enno Tamm, directeur général, ThisFish
- Lire l’avenir dans un verre de lait, par Isabelle Mailhot-Leduc, Coordinatrice, Systèmes alimentaires durables, Université Concordia
- S’alimenter de façon responsable; un défi à relever quotidiennement pour demain!, par Florence Lefebvre St-Arnaud, propriétaire, Les jardins Campanipol, Fermier de famille
- Une politique alimentaire nationale et l’avenir de l’alimentation, par Diana Bronson, directrice générale, Réseau pour un alimentation durable
- Aller de pire en mieux grâce à trois seuils, par Hal Hamilton, co-directeur, Sustainable Food Lab
- Intégrer les poissons et les fruits de mer au mouvement de l’alimentation durable et locale, par Justin Cantafio, campagniste pour les pêcheries durables, et Susanna Fuller, coordonnatrice de la conservation marine au Centre d’action écologique.
- Sécurité alimentaire et patrimoine culturel en alimentation au nord du Manitoba, par Carl McCorrister, enseignant retraité et membre du jardin communautaire de Peguis
- L’avenir de l’alimentation : reconstruire le centre du système alimentaire, par Jessie Radies, collaboratrice en alimentation locale chez Northlands
- Qui va décider de l’avenir de l’alimentation?, par Nick Saul, président et directeur général de l’organisme, Community Food Centres Canada
Ce billet marque la fin de la série sur l’avenir de l’alimentation. Je tiens à remercier chaleureusement tous les contributeurs ainsi que Adrienne Hiles et Sophie Silkes, co-conspiratrices du projet.